La Cour d'appel de Versailles a confirmé le 9 novembre dernier la décision du Conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt qui avait requalifié le contrat passé entre TF1 Production et douze ex-candidats de l'émission de télé-réalité "L'Ile de la Tentation" en contrat de travail.
L'arrêt rendu par la Cour d'appel de Versailles s'inscrit dans la lignée de la jurisprudence de la Cour de cassation qui avait déjà eu l'occasion de se prononcer sur la qualification du contrat liant les candidats au producteur du même programme de télé-réalité (Cass. soc., 3 juin 2009, n° 08-40.981, Sté Glem c/ Brocheton).
La Cour a retenu l'existence d'un contrat de travail, notamment au regard du « lien de subordination [entre l'équipe de production et les candidats] caractérisé par l'existence d'une « bible » prévoyant le déroulement des journées, et la succession d'activités filmées imposées, de mises en scènes dûment répétés, d'interview dirigées de telle sorte que l'interviewé était conduit à dire ce qui était attendu par la production ». Ce lien de subordination était également caractérisé selon la Cour par « le choix des vêtements par la production, des horaires imposés allant jusqu'à 20 heures par jour, l'obligation de vivre sur le site et l'impossibilité de se livrer à des occupations personnelles, l'instauration de sanctions, notamment pécuniaires en cas de départ en cours de tournage, soit, en définitive, l'obligation de suivre les activités prévues et organisées par la société GLEM ».
Plus encore qu'un lien de subordination, un véritable lien de dépendance a été reconnu par la Cour d'appel du fait que les passeports et les téléphones des candidats leurs avaient été retirés alors qu'ils se trouvaient à l'étranger.
Une rémunération était même versée aux candidats, soit la somme de 1.525 euros qualifiée par le contrat de « minimum garanti, non remboursable et définitivement acquis au participant, à valoir sur les royalties à percevoir sur les exploitations merchandising et/ou promotionnelles associant l'image du participant, son nom et son prénom ». La Cour d'appel a alors expressément considéré que la cause de cette rémunération était la « prestation de travail ».
Et comme pour effacer tout doute pouvant survenir quant à la légitimité d'une telle requalification, la Cour d'appel rappelle que « quand bien même la commune intention des parties n'aurait pas été une relation d'employeur à salariés, le droit du travail, d'ordre public a vocation à s'appliquer indépendamment des motivations et des intentions de chaque parties ».
Par cet arrêt, la Cour d'appel de Versailles ouvre un boulevard pour tous les candidats et ex-candidats d'émissions de télé-réalité qui pourront désormais demander au juge de tirer les conséquences d'une requalification de leur contrat en leur accordant les indemnités liées à la rupture de leur contrat de travail, particulièrement pour non respect de la procédure de licenciement, ainsi que le paiement des heures supplémentaires.
Il est à prévoir que de nombreuses affaires similaires seront plaidées dans les mois à venir et surtout que de nombreuses transactions seront signées en coulisses.
CA Versailles, 6ème ch., 09/11/2010, RG n° 09/03088
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